Réflexions sur l’état du monde :
la sagesse des 3 s…
Après
plus de 8 mois de silence dû à des événements personnels qui m’ont confronté à
ce que la Vie nous offre de plus choquant et de plus déroutant, à savoir la
mort d’un proche, me voici de retour parmi vous. Mais, reste-t-il encore des oreilles pour m’écouter
ou plutôt des yeux pour lire les pensées
de quelqu’un qui ne prétend à rien et n’est rien en termes de notoriété ou de
connaissances….
« Ecrire,
pour quoi faire ? » me suis-je posé à moi-même la question lorsque
j’ai commencé ce blog il y a maintenant plus de 3 ans. Au moins, pour essayer
de partager ses pensées et ses sentiments ; au plus, peut-être, pour se
satisfaire, car je crois que tout écrivain, quel qu’il soit, amateur ou professionnel,
et quel que soit le genre d’écriture qu’il développe, écrit pour le plaisir,
car l’écriture est un plaisir, certes narcissique, mais un grand plaisir quand
même.
Après
une période de silence et de retrait nécessaire pour pouvoir affronter ses propres
peurs, angoisses, incertitudes, remises en question radicales de ses propres
convictions,- en somme une activité humaine, bien humaine, «trop humaine» (
pour parodier Nietzsche )- il m’est difficile de ne pas revenir à ce qui
préoccupe mes semblables aujourd’hui, puisque désormais avec Internet et les
réseaux dits «sociaux» (selon l’expression consacrée ) le monde est devenu
«global» pour son bien et pour son mal !
Un
rapide tour d’horizon suffit à se convaincre que nous sommes entrés (depuis un certain
temps déjà!) dans une période de flou, de confusion, d’agitation, de peur ,
d’angoisse, de violence et d’intolérance de toutes sortes, avec des schémas
dramatiques qui se répètent, comme si l’histoire bégayait, ( le fameux schéma répétitif
dont parle l’Astrologie Transcendantale) mais cette fois-ci à une échelle
mondiale et collective, celle de l’Humanité dans son ensemble et de notre belle
planète, schémas répétitifs par cette persistance, dans certaines régions du
monde, de régimes dictatoriaux qui nient purement et simplement l’existence
humaine. Ce qui, par comparaison, permet à nos belles démocraties libérales de
paraître un havre de paix, un lieu où il fait bon vivre… si on se laisse
hypnotiser par le conformisme consumériste ambiant. Qui lui-même provoque, par
la profusion de fabrications …d’objets de consommation, des poussées de
monoxyde de carbone dans l’atmosphère, mais il faut bien relancer la
croissance, nous dit-on par ailleurs. On est alors en pleine
contradiction : relancer la croissance par la consommation en espérant
créer des emplois et en même temps préparer une conférence mondiale pour
limiter le réchauffement climatique! Sans comprendre que tout est lié et
qu’on ne peut pas tout avoir !...
On pourrait aussi disserter longuement
sur les raisons, les circonstances et les objectifs de la barbarie de
l’Etat islamique ou de Daech (peu importe le nom, il recouvre la même «force obscure»),
sur la stratégie à appliquer pour la combattre. Il n’en reste pas moins qu’ils
constituent des «révélateurs» pour mettre en évidence notre hypocrisie, double
langage et autres lâchetés. Et c’est sans doute cela la «fonction» de ces
«encagoulés», même s’ils ne le savent pas eux-mêmes. Voir jusqu’où nous
pourrons accepter leur violence, leur fanatisme, leur aveuglement. Ils ne
pourront sans doute pas gagner, mais cela se fera à quel prix ? Plus nous hésitons et attendons et plus ils
se renforcent. Rappelez-vous Hitler et sa stratégie d’intimidation.
Apparemment, la leçon n’a pas servi et l’Histoire se répète.
Tous ces
faits, tous ces problèmes ont en commun d’apparaître au même moment Ils
constituent tous des «révélateurs». De quoi ? D’une époque ! Mais,
j’en ai déjà parlé dans des «lettres» précédentes. Pour cela, il nous faut
changer de «lunettes» pour lire ce qui se passe actuellement au niveau mondial.
Et souvent, nos intellectuels ou nos «grands cerveaux» semblent bien dépassés
par les événements, dépendants qu’ils sont de «grilles de lecture» désormais
inopérantes. L’époque actuelle est un moment de transition entre une ère (celle
des Poissons) et une autre à venir (l’ère du Verseau) ; et comme toute
transition elle est longue et pénible à vivre, mais elle est riche de promesses
et de nouveautés. Jean de Larche, qui nous a quittés il y a quelques mois, en
parlait tellement bien dans ses ouvrages sur l’Astrologie Transcendantale.
Mais, qui se préoccupe d’avoir une vision différente aujourd’hui ? Qui
accepte que l’homme, le monde, les planètes et probablement le Cosmos dans son
ensemble dépendent d’une autre horloge, l’Horloge Cosmique (qu’une étude
astrologique sérieuse peut révéler). Seuls quelques visionnaires l’ont évoqué :
qui les a lus ou pris au sérieux ? Ce qu’ils disaient n’a rien de
catastrophiste (et ne ferait sûrement pas un bon scénario hollywoodien), ils en
parlaient comme d’une organisation cosmique du monde et de la Vie pleine de
sens et, en réalité, passionnante…Lisez ou relisez, entre autres, Dane Rudhyar
pour l’astrologie, Teilhard de Chardin
en Occident, Şri Aurobindo en Orient.
Et c’est
justement au moment où l’être humain devrait être le plus sensible à l’intérêt
général qu’il s’accroche désespérément à une sorte d’individualisme égoïste
complètement dépassé (sans doute une réaction de peur et
d’auto-défense devant le chaos apparent du monde!).
Les systèmes de pensée ou les philosophies ne
nous fournissent pas non plus de réponse satisfaisante aux soubresauts de notre
monde moderne. Ce que je vais dire pourra paraître iconoclaste ou aberrant,
mais nous n’avons pas besoin de «penseurs», de décideurs ou de «managers», nous
avons, comme le dit le Dalaï-Lama, cruellement besoin de gens de cœur ou de
bonne volonté pour continuer à faire marcher la maison Terre. Car, s’il y a des
certitudes à notre époque, elles ne sont que négatives : l’horizon semble
parfois bien sombre à l’échelle mondiale. Oui, nous avons désespérément besoin
de «guérisseurs» et non de «leaders» ou de décideurs, car notre monde et notre
humanité sont malades, malades de la croyance en la «séparation» (et donc de la
supériorité de certains sur d’autres !) entre les hommes eux-mêmes et
surtout entre les genres et les espèces du Vivant. Le jour où l’homme s’est
déclaré le maître de la Terre et de la Nature a été le début de sa fin!
Il nous
faut sans doute revenir à une sorte de sagesse (et donc d’humilité) ancestrale,
qui n’existe plus dans nos sociétés modernes, technologiques et prétentieuses.
Sagesse et non philosophie «philosophante»…Maintenant, il faut apprendre à
vivre avec les autres, ce qui signifie
tout d’abord apprendre à vivre avec soi-même…Quelque chose qui n’entre
pas dans nos sacro-saints programmes scolaires et qu’il faudra bien un jour
intégrer à une démarche éducative visant à créer des « êtres humains
nouveaux » susceptibles de créer un « monde nouveau ». La
lecture de l’ouvrage Entrer en amitié avec
soi-même (Edition La Table Ronde, 1991)
de Pema Chödrön, moniale bouddhiste américaine, peut nous y aider. Loin de
toute prétention et de tout discours «savant», la démarche de cette femme est
humaine, tellement humaine, car elle nous montre, dans le concret de ses
méditations quotidiennes, comment nous, toutes et tous, pouvons, sans être
forcément bouddhistes, entrer dans
l’intimité de notre être véritable et profond pour y découvrir ce qui nous
aidera à améliorer notre propre situation personnelle ainsi que celle du monde
par la même occasion.
Pour moi
qui ai passé des années dans ma jeunesse à lire, à commenter et à discuter sur
les «sutra» (grands textes) bouddhiques
du Grand Véhicule, la lecture de cet ouvrage me montre une vision directe, pratique
et finalement salutairement féminine, des principes et de la sagesse bouddhiques.
Il suffit de lire ce qu’elle écrit sur le «samsara»
( la suite indéfinie et aveugle des existences !) pour comprendre qu’elle
ne fait que résumer l’essentiel de nos comportements et pratiques habituels
dans la vie, cette existence banale et répétitive qui nous conduit à refaire
les mêmes erreurs et à nous fourvoyer dans les mêmes impasses. « L’essence du samsara est cette tendance à
chercher le plaisir et à éviter la douleur, à chercher la sécurité et à éviter
l’absence de base solide, à chercher le confort et à éviter la gêne. (…) c’est
ainsi que nous restons triste, malheureux, prisonnier d’une vision étroite de
la réalité. » (opus cité, p.211)
Ces quelques mots résument à eux seuls l’essentiel du quotidien de nos
semblables et contemporains. Nous recherchons le «confort» à tout prix pour ne
pas affronter nos problèmes et nos parts d’ombre.
Oui,
loin des rumeurs et des fureurs du monde, dans la simplicité de la découverte
de nous-mêmes, loin des discussions vaines et sans fin sur les causes et les
conséquences des événements qui font l’actualité, nous voici enfin au cœur de
ce qui devrait constituer notre contribution à l’apaisement des tensions … au
rééquilibrage de nos énergies et à la modeste et patiente réflexion qui nous
est nécessaire pour envisager l’avenir de notre planète, car désormais on ne
peut plus penser seulement local, même si notre quotidien peut et doit se
focaliser sur notre environnement le plus proche.
L’Europe
n’a plus d’ «âme», lit-on dans les commentaires journalistiques. Bien sûr,
car, oubliant tous ses idéaux de paix et de cohabitation, elle s’est fourvoyée
dans des considérations technocratiques, paraissant de cette façon comme
incompréhensiblement autoritaire et sans pitié vis-à-vis de ses citoyens, elle
s’est perdue dans une fuite en avant de rigueur budgétaire pour les peuples et
de laisser-aller financier intolérable pour les grandes banques. Elle aurait dû
se présenter comme un modèle pour les autres régions du monde, elle se renferme
lamentablement sur elle-même, donnant l’impression pitoyable d’une forteresse
assiégée. Elle pourrait avoir un but très clair et un idéal très élevé si elle
concentrait toutes ses énergies à la transition énergétique qui viendra tôt ou
tard si nous voulons avoir une chance de survivre en tant qu’espèce vivante sur
cette belle planète. Cet idéal peut générer des millions d’emplois, surtout si
cette révolution s’accompagne d’un développement raisonné et d’une agriculture
locale et écologique, respectueuse de l’environnement. De plus, l’Europe
pourrait devenir un sanctuaire pour des espèces végétales et animales menacées (ceci pour répondre au désir légitime de protection de la diversité cher
à Hubert Reeves). Que de projets exaltants cela pourrait générer, si elle mettait
en valeur la créativité étonnante de sa jeunesse qui invente à tour de bras des
solutions concrètes et viables pour améliorer notre quotidien tout en
respectant l’environnement. Solidarité et sobriété devraient être les mots
d’ordre de cette nouvelle société que nous voulons mettre en place avant qu’il
ne soit trop tard.
Il y
manque certes un troisième «s», car,
comme le souligne Pierre Rabhi, écologie sans spiritualité serait comme science sans conscience!...Que
faire d’une pratique écologique si nous ne la rattachons pas à une vision
élevée et verticale de l’homme et du monde. Nous retomberions bien vite dans
une vision utilitariste qui a montré ses limites et ses dangers. Ainsi, nous
aurions un triple «s», 3 pierres de touche pour mettre en place un «nouveau monde»:
solidarité (l’homme dans sa
dimension horizontale et donc dans sa relation aux autres!)-sobriété (stratégie pour faire
face à la situation actuelle de la Terre et de l’Humanité !)-spiritualité (l’homme dans sa
dimension verticale et donc dans sa relation à lui-même et au grand
mystère de l’existence!). Vous avez bien lu : je parle de spiritualité et
non de religion, celle-ci s’étant discréditée d’elle-même (il suffit de voir
l’état du monde à ce sujet !) Mettons donc en application ces 3 principes
et nous aurons quelques chances de dévier de notre trajectoire collective
suicidaire !
Vous l’avez
bien compris, l’individualisme effréné d’aujourd’hui ,où tout le monde
revendique ses petites libertés personnelles sans jamais se préoccuper de celles
des autres, où chacun parle de ses droits sans jamais mentionner ceux des
autres et encore moins ses devoirs, est juste à l’opposé de la démarche
préconisée par Pema Chödrön qui nous parle d’une quête , la découverte patiente
de nous-mêmes (sans rien omettre et surtout pas nos travers et nos peurs
enfouies) et la construction silencieuse d’une amitié avec le meilleur de
nous-mêmes, c’est à-dire avec l’être profond et véritable qui se trouve masqué
par nos fausses identités, par les images déformées que nous renvoient les
autres et notre désir de plaire. Oui, sans doute tout un programme, mais qui
peut tant nous apporter à nous-mêmes ainsi qu’aux autres.
Soyons endurants et supportons
avec courage mais sans complaisance les «orages» présents et à venir. Ils ne
font qu’annoncer ce qui s’en vient et qui peut, si nous le voulons, être le
meilleur de ce que l’Humanité est capable de réaliser.
Fidèlement vôtre.
L’arche du voyageur,
Tourtoirac, 31 août 2015.